La performance orale comme substitut au rituel : Ekutet, une cérémonie d’exhumation Teso

Résumé

Chez les Teso de l’ouest du Kenya, l’Ekutet (cérémonie d’exhumation) est pratiquée depuis des siècles pour traiter les problèmes physiques, mentaux et/ou émotionnels. Les malheurs persistants d’une famille ou d’une communauté, tels que les décès fréquents, les maladies, les accidents, les querelles inexpliquées et autres événements douloureux, peuvent être attribués à un membre malheureux de la famille ou de la communauté. Pour remédier à la situation et ramener la vie à la normale, les ossements du défunt sont exhumés, soit pour être réinhumés, soit pour être exposés dans un lieu sacré. Le rituel est notamment accompagné de représentations orales, sous forme de narrations, d’incantations, de serments, de chants de prières et de reconstitutions occasionnelles d’anecdotes dramatiques. Cet article a pour toile de fond la prise de conscience que le rituel de l’Ekutet lui-même semble diminuer, ce qui soulève une question pertinente : Qu’est-ce qui remplace, ou a remplacé, le rôle que ce rituel hautement psychologique a habituellement joué dans la vie du peuple Teso ? J’ai interrogé des membres de la communauté, tout en analysant les performances orales incorporées dans cet effort socioculturel et spirituel. Étant donné que le rituel proprement dit est devenu assez rare, les gens essaient apparemment de le maintenir en vie en cherchant dans la mémoire du rituel, ce qu’ils font par le biais de reconstitutions et de simulacres d’exhumation. Cela attire également l’attention sur le rôle de la mémoire, de la narration et de la reconstitution dans la réanimation ou la reviviscence de pratiques rituelles en perte de vitesse.